Le château d’Edelény, l’un des plus grands châteaux baroques de Hongrie, a une histoire riche et mouvementée. Construit au début du XVIIIe siècle, il a traversé les siècles, connaissant des périodes de gloire et de déclin avant de renaître grâce à des restaurations récentes. Quand on visite la Hongrie, on ne pense pas forcément au château d’Edelény et pourtant…
Après notre série d’articles sur les trésors du Nord de la Hongrie, la liste ne fait que de s’allonger. Aggtelek, le lac Tengerszem, Sátoraljaújhely, ses montagnes, le château de Boldogkőváralja… Voici maintenant le château d’Edelény ! En effet il est situé dans une ville frontière géographique. Située dans la vallée de la Bódva, un affluent du Sajó. Au Nord on arrive sur Aggtelek et le Zemplén, au Sud c’est la vallée du Sajo avec le début du massif du Bükk. Bienvenue dans un nouvel épisode de la nature préservée de la Hongrie !
Avant de parler de la visite du château d’Edelény en Hongrie, parlons de son protagoniste: Olajos János Ferenc, pour le prononcer à la hongroise.
Né en 1668 en France, plus précisément de Lorraine, Jean-François L’Huillier a rejoint l’armée des Habsbourg. Il y gravit les échelons grâce à son talent militaire. Il servit en tant que général dans l’armée autrichienne, notamment sous le règne de l’empereur Léopold Ier. Précisons qu’à l’époque la Lorraine est indépendante, mais (comme d’autres régions) est souvent occupée par la France. Elle sera rattachée finalement en 1766 au royaume de France.
Il est contemporain du grand duc Charles V de Lorraine. D’ailleurs il participa avec lui aux guerres contre l’Empire ottoman et les soulèvements hongrois. Jouant ainsi un rôle actif dans la stabilisation du royaume de Hongrie après la reconquête de territoires occupés par les Ottomans (Buda est libérée en 1686 des Ottomans).
En 1716, Jean-François L’Huillier lança la construction du château sur ses terres d’Edelény. Les meilleurs artisans furent recrutés auprès du régiment Caraffa. Pour ce chantier d’envergure, une logistique bien rodée fut mise en place.
Le bois nécessaire aux échafaudages, aux charpentes et aux menuiseries fut acheminé sur 20 à 40 km. La pierre, extraite des carrières locales, servit aux fondations et aux murs. Le sable et la chaux, essentiels à la fabrication du mortier et à la cuisson des briques, provenaient de Szendrőlád, une localité voisine. Les briques furent produites et cuites directement à Edelény.
À la fin du chantier, 18 maçons et leurs apprentis travaillèrent simultanément pour achever la construction. Les tâches plus simples furent confiées aux journaliers et aux paysans.
Après la mort du comte, sa femme, Marie-Madeleine de Saint-Croix, acheva la construction en 1730. L’architecte du château reste inconnu à ce jour. Cependant, on aimerait visiter le château d’Edelény en Hongrie à cette époque.
Le château atteignit son apogée sous Ludmilla L’Huillier, petite-fille du fondateur, et son époux, István Esterházy. Ensemble, ils entreprirent d’importants travaux qui modifièrent durablement l’architecture et les intérieurs.
En 1770, ils firent venir sur place le peintre itinérant Ferenc Lieb, particulièrement actif en Haute-Hongrie (actuelle Slovaquie). Ils lui confièrent la décoration de six salles. Aujourd’hui encore, le château conserve la plus grande collection de peintures murales rococo de Hongrie.
Après la mort de Ludmilla, son fils Ferenc Dessewffy hérita du domaine. Contrairement à ses parents, il ne réalisa aucune transformation majeure. Lorsqu’il mourut sans héritier en 1820, la couronne hongroise reprit la propriété, un drame que ses ancêtres avaient pourtant tenté d’éviter à tout prix.
En 1831, le prince Ferdinand de Saxe-Cobourg-Gotha, général de l’armée impériale et royale, acheta le château. Contrairement aux anciens propriétaires, il choisit de ne pas résider à Edelény. Il transforma le domaine en propriété agricole, ce qui marqua une période de prospérité pour la région. Certes, à l’époque on ne visite pas le château d’Edelény en Hongrie.
Avant 1845, il fit fonder le premier sucrier de Hongrie sur ces terres. Sous la gestion des Cobourg, l’agriculture et l’industrie connurent un essor considérable.
Cependant, les nouveaux propriétaires délaissèrent progressivement le château. Dès 1861, ils louèrent une partie du rez-de-chaussée pour y installer un tribunal. Avec le temps, ils firent démolir plusieurs bâtiments baroques annexes et laissèrent à l’abandon les jardins à la française du XVIIIe siècle. Au XIXe siècle, ils les remplacèrent par un parc à l’anglaise, mais sans entretien régulier.
Face à la détérioration du château, les autorités jugèrent nécessaire d’entreprendre des rénovations. Ainsi, entre 1910 et 1913, Ray Rezső Vilmos dirigea une restauration de style néo-baroque. Les travaux permirent d’ajouter un haut toit mansardé et de construire des ailes courbes sur les fondations des anciens bâtiments annexes.
En 1912, la compagnie minière de la vallée de Bódva loua une partie du château et transforma la chapelle en appartements.
Finalement, en 1928, après près d’un siècle sous la gestion des Cobourg, l’État hongrois racheta le château.
Le ministère de la Justice lança de nouveaux travaux en collaboration avec Rezső Ray, l’architecte de la précédente rénovation. Tout d’abord, les ouvriers démolirent un escalier en colimaçon baroque, puis ils supprimèrent les toilettes extérieures. Ensuite, ils construisirent un nouveau bâtiment administratif.
Par ailleurs, ils aménagèrent des cellules de prison au rez-de-chaussée et installèrent des logements pour les gardiens. Pendant ce temps, le tribunal s’étendit sur une grande partie du château, tandis que la chapelle, déjà transformée, fut réaménagée en habitations supplémentaires.
Plus tard, la Seconde Guerre mondiale causa d’importants dommages au château. En 1945, les forces soviétiques prirent possession de l’édifice. Finalement, lors des travaux de restauration ultérieurs, les ouvriers mirent au jour des inscriptions en cyrillique.
Après-guerre, faute de moyens, l’entretien du château fut négligé. Comme ce fut le cas pour la plupart des bâtiments hongrois sous l’époque communiste. Peu étonnant, vu que tout appartenait à l’état. Par exemple le château de Sissi à Gödöllő servait de bureaux. C’était pas l’époque de visite du château d’Edelény en Hongrie.
Ici c’est même pire, car certains salons décorés de fresques furent utilisés comme poulaillers. Des câbles électriques furent encastrés directement dans les peintures murales, provoquant des dégâts irréversibles. Bref, une catastrophe à tous les niveaux.
En 1965, le toit mansardé fut démonté et les éléments néo-baroques supprimés. Bien que quelques travaux de consolidation aient été réalisés, l’édifice continua à se détériorer.
Dans les années 1980, le tribunal et les logements furent évacués. L’absence d’entretien entraîna une dégradation rapide des fresques, exacerbée par les infiltrations d’eau. Certaines voûtes décorées furent détruites par le gel.
À la fin du XXe siècle, le château d’Edelény était en ruine. D’abord, plusieurs projets de réhabilitation furent envisagés, allant d’un casino à un hôtel de luxe, par chance aucun n’aboutit.
Finalement, en 2001, la gestion du site est confiée à l’Office national des monuments historiques. En conséquence un programme de restauration touristique est mis en place.
Enfin, une première phase de travaux est engagée grâce à des financements européens. On parle d’un montant de 2,4 milliards de forints (10 millions d’euros à l’époque), cela permit de rénover l’extérieur et 70 % des intérieurs, ainsi que le parc de 5,1 hectares. En dernier lieu, un bâtiment d’accueil et un parking pour 70 voitures et 8 bus furent également construits en anticipation future du tourisme.
En 2012, une deuxième phase de 900 millions de forints (3 millions d’euros à l’époque). Ainsi, cela permit d’étendre les zones accessibles au public et d’acquérir un terrain adjacent pour unifier l’ensemble du domaine.
Parallèlement, le bras mort du Bódva, devenu marécageux, fut réhabilité. Ce projet, financé par l’Union européenne à hauteur de 180 millions de forints, permit de restaurer 798 mètres de cours d’eau. Sans oublier la réintroduction des espèces végétales et animales indigènes.
En 2013, un programme pédagogique et culturel fut mis en place pour faire du château un centre éducatif et touristique.
Aujourd’hui, le château d’Edelény, rebaptisé « Château-Île d’Edelény« , est un joyau du patrimoine hongrois. Enfin, après des siècles de transformations et de négligence, il renaît en tant que lieu de mémoire et d’histoire. Pour conclure, ce lieu baroque est enfin prêt à accueillir les visiteurs du monde entier.
Ce château regorge d’histoires et de secrets. Une visite guidée en français permet d’explorer ses salles décorées, de comprendre son passé mouvementé et d’admirer la splendeur retrouvée de ce chef-d’œuvre baroque.
Réservez votre visite et plongez dans l’histoire fascinante du château d’Edelény !
Toutes les images de cette page ont été réalisées par le célèbre photographe Marc Antoine Villanova.